La Polypose Adénomateuse Familiale ou P.A.F.
Qu’est-ce qu’une Polypose adénomateuse Familiale?
La polypose adénomateuse familiale est une maladie héréditaire, ce qui signifie qu’elle est due à l’altération d’un gène et que cette altération peut-être transmise d’une génération à l’autre. Ce n’est pas une maladie contagieuse. Elle est caractérisée par le développement d’un grand nombre de polypes (plusieurs centaines, voire plusieurs milliers) sur le côlon et le rectum. En l’absence d’un traitement chirurgical adapté la croissance et la transformation d’un ou plusieurs de ces polypes en cancer est inéluctable.
Les polypes apparaissent généralement dès l’âge de 10 à 12 ans, mais la transformation d’un polype en cancer ne se fait que très exceptionnellement avant l’âge de 20 ans. Par contre en l’absence de traitement, ces polypes dégénèrent en cancer chez la plupart des patients avant l’âge de 40 ans. Idéalement le traitement doit donc être réalisé avant l’âge de 20 ans.
Comment la polypose adénomateuse familiale est-elle transmise ?
Si une personne atteinte souhaite avoir une descendance, le risque de transmission de la maladie à chacun de ses enfants est de 50%. Ce risque est une donnée moyenne si bien que, selon les familles, la proportion des enfants atteints peut présenter de grandes variations autour de cette moyenne. Les enfants n’ayant pas d’altération génétique n’auront pas la maladie et n’auront aucun risque de la transmettre à leurs enfants.
Dans de rares cas, des personnes peuvent être porteuses d’une polypose alors qu’aucun des parents n’est atteint. Ces personnes sont porteuses d’une mutation génétique survenue avant la naissance et peuvent la transmettre à leurs enfants; cette transmission est identique à celle des patients ayant une polypose familiale.
Symptômes cliniques
Lors de leur apparition, les polypes ne sont responsables d’aucun symptôme. Tout au plus peuvent-ils entraîner quelques douleurs abdominales ou troubles du transit intestinal. L’émission de sang dans les selles a le mérite d’alerter mais sa survenue est rare. La présence de symptômes est en générale plus tardive et traduit déjà la transformation d’un des polypes en cancer. Il faut donc dépister l’affection avant tout symptôme. C’est dire l’intérêt de l’enquête familiale et génétique qui permet à partir d’un patient, de pouvoir identifier dans sa famille les sujets chez qui l’affection peut être présente.
A côté des manifestations purement intestinales, la Polypose Adénomateuse Familiale peut s’accompagner d’autres lésions dont la présence peut aider au diagnostic. Ces lésions, dites extra coliques, sont variables et se développent de manière différente d’un patient à l’autre. Ce peut être :
♦ Des kystes sous la peau, appelés kystes épidermoïdes, qui ne deviennent jamais cancéreux.
♦ Des tumeurs des os ou ostéomes, non cancéreuses, pouvant se trouver sur la mâchoire, sur les os du crâne ou plus rarement sur d’autres os.
♦ Des polypes de l’estomac et du duodénum. Les polypes duodénaux peuvent devenir cancéreux et nécessitent donc une surveillance endoscopique régulière par un gastro-entérologue.
♦ Des lésions bénignes de la rétine qui se présentent sous la forme de petites taches noires qu’on appelle hypertrophie congénitale de l’épithélium pigmentaire rétinien. Elles ne portent qu’exceptionnellement préjudice à la vision.
♦ Des tumeurs desmoïdes qui se présentent comme un développement excessif des tissus conjonctifs sous la forme d’épaississement dur et fibreux rappelant par leur aspect les tissus cicatriciels. Ces tumeurs sont bénignes mais peuvent par leur croissance refouler ou comprimer les organes du voisinage. Elles se développent à l’intérieur de l’abdomen au niveau des muscles abdominaux.
Le dépistage et le traitement de ces manifestations va de la simple surveillance médicale à un traitement par des médicaments, voire plus rarement à une intervention dont l’indication sera discutée par les médecins spécialistes.
Comment la P.A.F. est-elle détectée dans une famille à risque ?
L’enquête familiale permet de dresser un arbre généalogique. Un conseil génétique peut ensuite être donné aux membres de la famille. L’analyse génétique par un médecin spécialisé en génétique moléculaire permet de déterminer, à partir de prélèvements sanguins chez les différents membres de la famille, si la personne à risque a hérité de l’anomalie génétique associée à la maladie. Cet examen fourni une information qui oriente le médecin dans la prise en charge des personnes ayant l’altération génétique.
Outre l’examen clinique génétique, deux types d’examens doivent être réalisés :
♦ L’examen du côlon et du rectumest du ressort du médecin gastro-entérologue. Suivant les cas, l’examen de dépistage peut être une recto-sigmoïdoscopie ou une coloscopie. Cet examen permet de chercher les polypes dans l’intestin. En l’absence de tout symptôme, ce dépistage doit être débuté à partir de 11 ans et répété tous les ans. Les polypes peuvent en effet être absent lors du premier examen et n’apparaître qu’ultérieurement. Si les polypes ont été détectés par une recto-sigmoïdoscopie, l’examen doit être complété par une coloscopie totale (étude de tout le côlon) qui détermine l’extension de la polypose. La présence de polypes est une indication au traitement chirurgical. L’opération est habituellement réalisée avant 20 ans.
♦ L’examen de la rétinepar un médecin ophtalmologiste permet la détection de l’hypertrophie congénitale de l’épithélium pigmentaire rétinien. Celle-ci est visible par un examen du fond d’œil qui se fait en consultation avec un ophtalmoscope à trois miroirs. Dans 70% des familles, cette manifestation est présente chez toutes les personnes atteintes et doit être cherchée chez tous les enfants lorsque le parent atteint de polypose en est lui-même porteur. Elle peut être présente dès l’enfance mais dans les autres familles, cette manifestation est absente. Ce n’est donc plus une méthode sûre de diagnostic.
Traitement de la Polypose Adénomateuse Familiale
Les polypes ne peuvent pas être retirés un à un car ils sont trop nombreux et ils reviennent rapidement. L’intervention chirurgicale est le seul traitement efficace et plusieurs techniques sont utilisées avec succès. Le type d’intervention sera choisi de la manière la plus adaptée à chaque cas. Même si l’intervention semble un peu lourde, elle seule est à même de mettreà l’abri d’un cancer du côlon qui surviendrait de manière inéluctable en l’absence de traitement. Les interventions les plus habituelles sont:
♦ La colectomie totale avec anastomose iléo-rectale. Cette intervention consiste à faire l’ablation de tout le côlon. L’extrémité de l’intestin grêle est abouchée au rectum. Après l’intervention, le transit intestinal est fait de 2 à 4 selles par 24 heures. Cette intervention conserve le rectum qui doit être l’objet d’une surveillance deux fois par an, par rectoscopie au cours de laquelle les polypes doivent être détruits. Cette surveillance doit être maintenue la vie durant et si le nombre de polypes apparaissant sur le rectum devenait excessif, il est alors possible d’enlever le rectum et de transformer l’anastomose iléo rectale en anastomose iléo anale dont la description est faite ci-dessous.
♦ La coloprotectomie avec réservoir iléal et anastomose iléo anale. Cette intervention consiste à faire l’ablation de tout le côlon et du rectum supprimant ainsi toute la muqueuse à partir de laquelle naissent les polypes. L’anus et le sphincter sont conservés. L’intestin grêle terminal est replié sur lui-même pour former un réservoir qui a pour fonction de remplacer le rectum. Ce réservoir est descendu jusqu’à l’anus auquel il est abouché. Ce montage doit parfois être temporairement protégé du passage des par l’abouchement de l’intestin grêle d’amont à la peau. Après cette opération le transit est fait de 4 à 5 selles par 24 heures.
♦ La coloprotectomie avec iléostomie. Cette intervention, beaucoup plus rarement réalisée, est réservée aux patients ayant développé un cancer du rectum ou qui ne peuvent avoir une anastomose iléo anale pour une autre raison. L’intestin grêle est abouché de manière définitive à la peau et les patients ont une poche dans laquelle se déversent les matières.
Combien de temps nécessitent l’intervention chirurgicale et la convalescence ?
La durée du séjour à l’hôpital varie selon le type d’intervention réalisée. Elle est en général de 10 à 15 jours. Dans le cas de l’anastomose iléo anale,la suppression de l’éventuelle iléostomie de protection nécessite une deuxième hospitalisation qui dure 7 à 8 jours. La convalescence à domicile nécessite 4 à 6 semaines avec au début une certaine limitation des activités. Le travail peut être repris dans un délai de 6 à 8 semaines après la sortie de l’hôpital. Avant la sortie le médecin choisira avec le patient, le régime alimentaire qui parait le mieux adapté en faisant intervenir un diététicien. Pendant les premières semaines suivant l’intervention une alimentation pauvre en fibres en évitant les fruits et les légumes est recommandée. Progressivement le régime peut être élargi, chaque patient pouvant adapter son régime selon les réactions de son organisme.
Changement dans la vie quotidienne après l’intervention.
La plupart des patients peuvent s’alimenter sans régime particulier et mener une vie normale quelques mois après l’intervention chirurgicale. Quelques personnes seront cependant sujettes à une accélération du transit intestinal. L’activité sexuelle ne sera pas affectée si l’intervention est réalisée à un stade précoce de la maladie. La réalisation d’une anastomose iléo anale peut entraîner une baise de la fécondité chez la femme jeune. L’accouchement par voie basse est possible avant ou après chirurgie en en discutant auparavant avec chaque chirurgien.
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